Cohesity: permettre enfin à la sauvegarde de générer de la valeur
Coup de tonnerre sur le marché de la sauvegarde : Cohesity rachète Veritas NetBackup. Avec comme ambition supplémentaire de tirer davantage de valeur des données stockées dans les sauvegardes. Pour ce faire, l’entreprise a développé Gaia, une application d’IA de génération augmentée de récupération (RAG).
Au début de cette année, Cohesity annonçait la reprise d’une partie importante de l’activité de Veritas, plus précisément le volet consacré à la protection des données géré par l’entité Veritas NetBackup. « Il s’agissait d’un deal très créatif », dixit Sanjay Poonen, CEO, que Data News a rencontré au siège social de Cohesity à San Jose dans la Silicon Valley à l’occasion d’un récent IT Press Tour. « Nous avons planché durant 15 mois sur cette opération. » Poonen n’a rien d’un inconnu dans le secteur puisqu’il est l’ex-COO de VMware. Directement après sa nomination, Cohesity et Veritas ont entamé des pourparlers, sans que Poonen dévoile qui a été à l’initiative du rapprochement. « Les deux se sont déroulés en parallèle. »
Les entreprises sont confrontées à des défis majeurs en termes de données. « C’est surtout l’absence de plateforme unifiée pour la sécurisation et la gestion qui pose un problème », explique ainsi Sanjay Poonen. « Car les données sont comme un iceberg. Vos données primaires sont directement disponibles, mais sous la partie visible de l’iceberg, il existe des masses de données secondaires, souvent sur bande. » Celui qui se souvient encore des cassettes audios sait combien il est difficile d’y retrouver le début d’une chanson. Par la suite, les données sur disque – le CD de musique – a représenté une avancée majeure dans la mesure où le disque était doté d’un index. Mais comparé à une cassette, le CD était extrêmement coûteux. Cette réalité prévaut encore et toujours dans le monde IT, de telle sorte que la bande continue à être utilisée pour les sauvegardes.
Une seule plateforme
Avec leurs rançongiciels, les cybercriminels ciblent toujours davantage les données secondaires. Celles-ci stockent en effet l’historique d’une entreprise, d’où l’impact sans cesse croissant d’une telle attaque. « C’est ce que nous constatons aujourd’hui », précise Sanjay Poonen. « Le marché du stockage secondaire semble subitement se muer en un marché de la sécurité. » L’émergence de l’IA ne fait bien sûr qu’accélérer le mouvement. « L’IA permet en effet de mieux analyser les données anciennes stockées. » Et il s’agit là du coup du marché que cible Cohesity, à savoir une seule et même plateforme pour l’ensemble des opérations : stockage, gestion, sécurisation et analyses.
C’est aussi précisément la raison pour laquelle Cohesity a lorgné Veritas. « Dans le contexte de l’IA, il faut nécessairement de gros volumes », poursuit Sanjay Poonen. « Ce qui nous a fait songer automatiquement à Veritas. Car pas moins de 96 des entreprises du Fortune-100 sont clientes, outre 400 du Global 500. » Aujourd’hui, les charges de travail sont largement sur Azure, AWS, Google, OCI et VMware. Mais Veritas propose entre-temps plus de 500 adaptateurs pour pratiquement n’importe quelle application. « Une grande partie du travail a déjà été effectuée à ce niveau. »
Des années d’avance
Avec Gaia, Cohesity fait un pas supplémentaire majeur. « À mes yeux, il s’agissait d’une question logique », réagit Sanjay Poonen. « Comment déployer l’IA sur l’ensemble des données que nous gérons pour nos clients ? » La réponse se trouve dans l’IA de génération augmentée de récupération (RAG IA). Pour éviter que la concurrence ne lui vole cette idée, Cohesity a travaillé à la solution durant une année entière dans le plus grand secret. « D’après moi, nous avons désormais de 3 à 4 ans d’avance. » Le nom Gaia – la déesse primordiale dans la mythologie grecque – semble faire référence à l’importance de la plateforme. « Mais il s’agit simplement de l’acronyme de Generative IA Application. »
Concrètement, l’utilisateur envoie ses requêtes à Gaia, comme ‘fait un résumé de l’ensemble des rapports parus sur un sujet spécifique en 2023’, après quoi Gaia analyse les sauvegardes disponibles et propose une synthèse. L’idée induit une approche totalement originale. « On a longtemps considéré la sauvegarde comme une assurance, mais dans le même temps comme un actif dormant », explique Kit Baell, chief revenue officer. « C’est quelque chose que l’on espère ne jamais devoir utiliser et qui, durant toute cette période et jusqu’à ce que l’on en ait besoin, ne fait que coûter de l’argent. » Le recours à l’IA permet de générer une certaine valeur de ces sauvegardes. Et avec l’avènement de ChatGPT, l’idée paraissait triviale. « Tel ne fut pourtant pas le cas », indique Kit Beall. « Ce fut un processus de longue haleine. Ce fut un succès immédiat qui a nécessité dix années. »
Chaque client compte
Cohesity se veut très claire sur la suite des événements. « Nous n’entendons perdre aucun client », insiste Sanjay Poonen. « C’est pourquoi nous n’obligeons personne à migrer vers Cohesity. Vous préférez garder Veritas NetBackup ? Pas de problème. Nous continuerons à en assurer le support. » Un rachat peut être synonyme d’inquiétudes sur le marché, comme l’a encore montré la reprise récente de VMware par Broadcom. Rien de tout cela chez Cohesity, affirme Poonen. En l’occurrence, aucun message alarmiste de hausse de prix ou d’abandon de clients et de partenaires.
Concrètement, Cohesity rachète environ deux tiers de Veritas, le processus de dissociation devant être finalisé d’ici la fin de l’année. La nouvelle Cohesity représentera une valeur d’environ 7 milliards $ pour un chiffre d’affaires de 1,8 milliard $. Après 2025, l’entreprise entrera en Bourse. Les observateurs s’attendent à voir cette opération marquer le point de départ d’une consolidation accrue du secteur.
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