Saskia Van Uffelen (Arinso) : “Les femmes sont nettement mieux représentées dans les RH que dans l’IT”

“Ce qui m’a frappé après mon départ de HP pour Arinso? Le nombre de femmes que je voyais subitement dans les salles de réunion. Chez HP, j’étais souvent la seule femme, alors qu’à présent parfois plus de la moitié de l’assistance est composée de dames. Quant à savoir si c’est mieux ou moins bien. Je n’en sais rien, c’est différent, mais il faut qu’il y ait un mélange sain des deux, à tous les niveaux.” Des propos tenus par Saskia Van Uffelen, administratrice déléguée d’Arinso.

Elle avoue être arrivée à l’IT par la bande. Elle étudiait l’éducation physique et la pédagogie dans l’objectif d’organiser des camps sportifs. “Mais il fallait également maîtriser l’aspect financier, et c’est ainsi que je suis arrivée à l’informatique, dans une PME qui vendait des solutions pour les salles de ventes aux enchères.” Etape suivante: Xerox, où elle avait le profil idéal, de par son bagage, pour assurer la formation, mais où elle se voit finalement attribuer aussi la responsabilité du canal indirect. “Un défi en soi, car Xerox était alors une organisation très directe”, avoue-t-elle.Postuler juste en faceVient alors le passage à Compaq, avec ce détail amusant que, pour postuler chez Compaq, il lui suffisait de sortir de Xerox et de traverser simplement la rue, puisque les bâtiments de Compaq se situaient à l’époque juste en face de ceux de Xerox. “Et c’était plutôt délicat”, se rappelle-t-elle le sourire aux lèvres, “nous avons donc finalement décidé que l’entretien d’embauche aurait lieu ailleurs.” Chez Compaq, elle coordonne ensuite deux fusions, d’abord le rachat de Digital, puis la fusion avec Hewlett-Packard. Une aventure qui durera quinze ans. “Ça a toujours été passionnant”, souligne-t-elle, même s’il y a eu de grandes différences. “A l’époque, le gros avantage de Compaq, c’est qu’il s’agissait d’une entreprise de taille encore réduite, rien n’était acquis, tout était à faire et tout était possible, la seule limite résidait dans votre propre créativité – un peu comme chez Arinso à présent. Xerox, en revanche, disposait déjà alors d’une structure très lourde, et HP aussi à la fin, mais la période entre les deux a été magnifique.”Quelle période a représenté le plus de défis? “Toutes, en fait. Au début, le défi était que je n’avais pas fait les bonnes études, car je ne connaissais rien de l’informatique, ensuite c’était que je n’avais pas été dans la vente, que je n’avais pas d’expérience en marketing, pas suivi d’études en management. Il fallait à chaque fois faire ses preuves, et peut-être même un peu plus en tant que femme, mais ça vous oblige à rester très affûté et ce n’est certainement pas un inconvénient.”Plus difficile?Est-il plus difficile d’occuper une fonction élevée en tant que femme? La question déclenche un éclat de rire: “Je ne l’ai jamais fait en tant qu’homme, qu’il n’y ait aucun doute là-dessus, je n’en sais donc que ce que j’en ai entendu dire! Plus difficile? Pas vraiment, je pense. Une fois que vous avez atteint un certain niveau, vous êtes respectée tout autant. Pour atteindre ce niveau, vous ne devez peut-être pas prouver davantage qu’un homme, mais vous devez faire preuve de constance – et c’est plutôt positif car vous devez vous astreindre ainsi à une norme de qualité précise qui vous rend également plus forte.”Elle s’inscrit toutefois en faux contre certaines entreprises qui considèrent comme une obligation de pourvoir un certain pourcentage de postes de management avec des femmes. “Si des hommes meilleurs sont disponibles, alors il faut tout simplement choisir un homme. Soit une personne convient pour le job, soit elle ne convient pas – si c’est une femme, tant mieux, mais ce ne doit pas être une obligation!”Eduquer votre entourageEn tant que mère de cinq enfants de 2,5 à 22 ans, elle a évidemment de quoi faire après sa journée de travail, mais avec l’aide de son époux, tout se passe bien, précise-t-elle. “Il faut toutefois éduquer son entourage. Je veux dire par là qu’en dépit de mon agenda incroyablement difficile, je parviens régulièrement à mettre mes enfants au lit à six heures et demie – avant de me remettre au travail. Je déteste les réunions qui commecent à cinq heures et demie, je préfère qu’elles aient lieu le midi ou tôt le matin. Vous devez donc apprendre aux gens comment ils doivent travailler, comment organiser au mieux leur journée. Finalement, l’essentiel, c’est que le boulot soit fait, quel que soit le moment ou l’endroit où vous travaillez.”Dans une société comme Arinso, ce concept peut toutefois entraîner des problèmes, et elle le comprend bien. “Quasiment la moitié de notre chiffre se réalise sur la base de projets, facturés par jour. Mais comment expliquer à votre client que vous lui facturer des jours de travail pour un de nos collaborateurs qu’il n’a vu qu’une partie du temps? C’est un défi pour tout qui est actif dans la réalisation de projets que de faire comprendre à ce client qu’un consultant a effectué des choses particulièrement efficaces pour lui sans avoir été présent physiquement dans son entreprise. A nouveau une question d’éducation, donc.”Pourquoi avoir quitté HP?”Il y a eu plusieurs raisons, mais le carcan dans lequel vous enferme une grande entreprise américaine comme HP était de plus en plus difficile à concilier avec la complexité d’une entité belge et les nuances que cela exige sur le plan de la gestion du personnel ainsi que de l’approche des clients et du marché. Quand vous n’avez plus que peu, voire pas d’impact sur ce qui devrait arriver, alors vous perdez la confiance de vos clients et vous jouez également votre crédibilité à un moment donné, sachant que vous ne pouvez le faire qu’une seule fois. Je n’ai donc plus voulu d’une grande entreprise américaine, ni d’une société purement informatique. Mais je visais un secteur de services, car il faut continuer à aller de l’avant en se basant sur les connaissances et l’expérience acquises. Arinso recherchait en outre des gens avec de l’expérience en matière d’organisation, qui étaient en mesure de donner de la structure et de la dynamique à une organisation, pas quelqu’un qui avait des connaissances en SAP ou en ressources humaines.”Elle doit toutefois avouer qu’elle se trouve toujours en grande partie dans un environnement IT. “Dans un dossier RH, ce sont aujourd’hui le directeur RH, le CEO, le CIO et le CFO qui décident. Arinso propose également de la capacité d’hébergement pour un forfait mensuel par collaborateur, par fiche de salaire – de l’informatique donc. Attention: les leçons de l’IT servent toujours, l’automatisation des RH n’en est en effet encore qu’à ses débuts, c’est un secteur qui n’a accordé que très tard de l’attention à l’automatisation et à l’optimisation de processus, sans parler de l’externalisation. Principal défi, en l’occurrence: réaliser la transition vers l’automatisation sans commettre d’erreurs qui peuvent peser lourd au niveau humain – une erreur dans une feuille de paie peut affecter énormément la personne concernée sur le plan émotionnel.”Faire avec ce qu’on a…Son plus grand défi sur le plan personnel est d’apprendre à vivre dans un environnement où il y a davantage d’opportunités d’affaires que ce que l’on peut réaliser effectivement avec les effectifs limités disponibles. “Vous voyez tout ce qui est encore possible, mais il vous manque le personnel nécessaire, et vous devez donc vous fixer des priorités et choisir ce que vous pouvez faire et ne pas faire. Nous avons d’ores et déjà beaucoup d’outsourcing offshore, les développements SAP haut de gamme ont lieu en Belgique mais les tests sont réalisés ‘offshore’.” La Belgique est d’ailleurs un pays où la part de l’externalisation est très élevée, puisqu’elle représente quasiment la moitié du chiffre d’affaires. Le plan stratégique d’Arinso prévoit que, d’ici 2007-2008, cette proportion devra également être atteinte au niveau de l’ensemble du groupe.Arinso a d’ailleurs d’autres plans encore, dont l’e-HR n’est que la partie visible de l’iceberg, selon Van Uffelen. “Nous créons par exemple des modèles qui mettent des informations à la disposition de l’utilisateur final, mais nous ne faisons encore rien avec l’interprétation de ces informations, la ‘business intelligence’ donc. Davantage d’importance doit également être donnée à la gestion du changement, pas en termes d’IT mais plutôt du côté des travailleurs, parce qu’ils sont les premiers concernés. Et peut-être que notre plus grand défi est le suivant: nous sommes spécialisés dans l’optimisation RH, mais comment actualiser la politique RH d’un client sans déstabiliser le climat social? C’est tout bonnement passionnant!”.

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