Etoile montante en période de corona, puis rattrapée par Teams: qu’en est-il à présent de Slack?

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La pandémie du corona provoqua une croissance explosive de l’utilisation des plates-formes collaboratives numériques. Il n’y eut pas que la popularité de Microsoft Teams à grimper en flèche, car Slack surfa aussi sur la vague. Mais à présent que nous avons migré vers des modèles de travail hybrides, c’est surtout Teams qui continue à avoir le vent en poupe. De son côté, Slack fait entre-temps partie du portefeuille de Salesforce. ‘Nous ne voulons pas concurrencer Teams. Nous faisons d’autres choses.’

En raison de la pandémie, les entreprises se virent contraintes de rechercher en toute hâte des outils permettant à des équipes de collaborer et de communiquer à distance. Microsoft Teams s’était précédemment déjà fait connaître en tant que solution de visioconférence, ce qui fait que la plate-forme représenta un choix logique pour beaucoup d’entreprises. C’est précisément pourquoi la popularité de Slack, qui fila comme une comète durant la période du corona, sauta aux yeux. La plate-forme devint la place par excellence pour maintenir les équipes connectées et productives.

Et il y avait de bonne raisons pour cela: Slack dispose d’une interface intuitive, s’intègre bien à d’autres applis et offre une solide solution pour organiser des entretiens en canaux. Dans Slack, on vit apparaître spontanément des canaux typiques comme ‘after work’ ou ‘work-related memes’. Pour bon nombre de collaborateurs, Slack parut vraiment être une bouée de sauvetage. Durant la pandémie, le nombre de clients payants a crû de trente pour cent.

Mais parallèlement, Microsoft Teams ne se reposa pas sur ses lauriers. En raison surtout de l’intégration avec SharePoint Online, OneDrive et les autres applis de l’écosystème Microsoft, Teams devint une solution tout-en-un. Pour beaucoup, la conclusion est dès lors que Teams était là pour rester, alors que Slack sembla plutôt être un phénomène passager, surtout aujourd’hui que les modèles de travail hybrides sont généralisés.

Plus qu’un endroit numérique où trainailler

Il n’empêche que Slack demeure aujourd’hui aussi un acteur important et que la plate-forme dispose de ce qu’on appelle en jargon des dedicated users (utilisateurs dédiés). En 2020, Salesforce racheta Slack pour 27,7 milliards de dollars, excusez du peu: un signe évident que l’éditeur de logiciels CRM croit fermement dans la plate-forme. Depuis lors, Salesforce a effectué différentes étapes stratégiques, selon Freek Lemmers, Regional VP chez Slack, dans une interview accordée à Data News.

‘Slack se trouve à présent dans une autre position que lors du rachat. A l’époque, l’accent était très nettement mis sur la collaboration à distance, et Slack se profilait comme le quartier général numérique pour les employés. Ces dernières années, Slack a cependant évolué vers un lieu de travail centralisé qui est bien plus qu’un endroit numérique où s’accrocher.’

Freek Lemmers, Regional VP chez Slack: ‘Au fil des années, Slack a évolué vers un lieu de travail centralisé, bien plus qu’un endroit où simplement traînasser.’ © Melanie Lemahieu Photography

Fini de basculer

La vision stratégique consistait à intégrer des fonctionnalités tant nouvelles qu’existantes dans Slack. ‘Tout tourne autour de la rationalisation des applis et de la hausse de la productivité’, explique Ronal Karia, VP pour l’Europe centrale et septentrionale. ‘Salesforce Customer 360 contient nombre d’applications et de produits. Ceux-ci sont évidemment pratiques, mais provoquent dans un certain sens aussi une perte de productivité, du fait qu’il faut continuellement basculer de l’un à l’autre. La plupart des applis sont visionnées tout au plus une dizaine de secondes. Il en résulte qu’on passe parfois à côté de messages dans l’une ou l’autre, surtout s’il faut encore aussi tenir à l’œil l’e-mail pour les notifications.’ Karia renvoie ici à une recherche effectuée par Harvard Business Review, d’où il ressortait que le basculement entre applis prenait quotidiennement en moyenne neuf pour cent du temps de travail. ‘Et c’est sans compter d’autres pertes de temps dans la chaîne, parce que quelqu’un d’autre utilisant une appli spécifique attend une réaction de votre part.’

En donnant à Slack une place centrale dans Customer 360, Salesforce veut rationaliser ses applications. Lemmers: ‘Slack constitue ainsi l’endroit où affluent toutes les notifications et les actions issues des différents environnements et où vous donnez aussitôt une réponse ou posez une question en retour ou effectuez une action.’ Une action-réaction plus rapide donc, sans qu’il faille surveiller plusieurs environnements. Slack ouvre ainsi la porte à plus de 2.500 applications. C’est surtout la façon dont l’interface Slack est conçue et son utilisation intuitive qui doivent nettement faciliter les intégrations. L’approbation d’une note de frais, par exemple, peut alors se faire avec une simple coche.

Coexistence

Slack gagne en attractivité surtout pour les entreprises qui utilisent déjà l’écosystème Salesforce. Mais Slack peut-elle également offrir une réponse à la position dominante de Microsoft Teams? Cette concurrence continue d’exister en effet. ‘Notre objectif n’est pas de concurrencer Teams’, affirme Karia. ‘Nous voulons surtout réaliser d’autres choses en faisant de Slack la plate-forme de travail centralisée. Une intégration avec Microsoft 365 pourrait même en faire partie.’

Selon Salesforce, cela continuera en outre de la sorte sous l’appellation Slack. Salesforce se dit convaincue que le marché des outils collaboratifs est suffisamment vaste pour offrir de la place à plusieurs acteurs. ‘Avec Slack, nous nous concentrons principalement sur des intégrations poussées avec des outils que les entreprises utilisent au quotidien dans Salesforce.’

En faire plus avec l’IA

Pour renforcer cette intégration, Slack mise pleinement sur l’IA. Il y a deux mois environ eut lieu le lancement de Slack AI, un nouveau levier pour une meilleure productivité. Karia: ‘Slack AI pourra changer nos processus de travail en profondeur. Parmi les utilisateurs de Slack, mais aussi de manière plus large au sein de Salesforce, on constate une diminution des réunions de type tête-à-tête. Alors que durant la pandémie, on passait quasiment toute la journée dans des réunions en ligne, tel est nettement moins le cas aujourd’hui. Slack a modifié la façon de travailler: on s’envoie à présent davantage de messages ou on propose des mises à jour par voicecalls ou videocalls brefs.’

C’est là une manière de travailler qui ne plaît pas forcément à beaucoup de monde, car cela fait davantage d’entrées et de messages non lus tout au long de la journée. C’est précisément là où Slack AI entend donner une réponse: via une simple commande dans la fenêtre de chat, vous pourrez solliciter un résumé de ce que vous avez manqué, ou simplement demander si certaines choses sont attendues de votre part. En intégrant l’environnement Salesforce, Slack AI proposera directement aussi des actions. Le modèle d’IA se formera de lui-même sur base des données issues des différents canaux de chat.

Un endroit central unique

C’est non sans une certaine fierté que Freek Lemmers explique que Kickstart AI, une alliance collaborative entre quelques entreprises néerlandaises qui veut accélérer le développement de la technologie IA, utilise Slack AI. Plus près de chez nous, il y a l’exemple de Mobile Vikings, un opérateur de réseaux mobiles virtuels pour la Belgique et la Pologne, établi à Hasselt. ‘Mobile Vikings est l’un de ces utilisateurs dédiés Slack depuis 2014 déjà’, déclare Jelle Van Hees, Cloud & Infrastructure Engineer chez Mobile Vikings. ‘Durant la période covid, nous avons fait migrer toute l’organisation vers Slack, et nos processus ont continué tourner à merveille.’

Aujourd’hui, Mobile Vikings utilise Slack comme un lieu de travail central intégrant de très nombreuses applis. Jira, une appli de gestion de projets flexible, y est incontestablement la plus importante. ‘L’intégration regroupe une grande partie des tâches de nos collaborateurs du support en un endroit central unique. La création et la collecte d’un ticket de support, l’affichage de son statut, le suivi de la gestion des incidents, les rapports,… Du fait que nous traçons automatiquement toutes les étapes dans Slack, tout le monde peut tout suivre dans un seul et même environnement.’

Quand des applis parlent aux humains

Van Hees a calculé que Mobile Vikings a entre-temps amorti dix-huit fois son investissement dans Slack, précisément parce que les collaborateurs peuvent ‘sauter’ de nombreuses étapes dans différents environnements d’appli. ‘Le cycle de développement s’effectue dans nombre d’entreprises encore et toujours dans des silos, ce qui n’est plus le cas chez nous.’ L’intégration va en outre plus loin que des applis qui communiquent entre elles. ‘Dans le traitement des tickets dans Jira, l’application envoie régulièrement à nos collaborateurs la requête de convertir du code Android en Swift (le langage de programmation d’Apple, ndlr). Or pareille requête peut simplement être signifiée à Claude, une appli qui convertit le code au moyen de l’IA, puis enchaîner avec Jira, qui prend alors le relais.’ Slack prend ainsi en charge non seulement les relations entre applis, mais aussi celles entre les applis et les humains.

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