Laissons à Jef Colruyt le soin de développer le système eVoting!

Les choses ne s’arrangent apparemment pas au niveau du développement du système eVoting en Belgique: l’adjudicataire choisi n’arrive pas à finaliser son produit et ses concurrents promotionnent finement leur système abouti à l’échelle internationale.

Les choses ne s’arrangent apparemment pas au niveau du développement du système eVoting en Belgique: l’adjudicataire choisi n’arrive pas à finaliser son produit et ses concurrents promotionnent finement leur système abouti à l’échelle internationale. Je dois cependant reconnaître que je trouve ces tout nouveaux systèmes étrangement désuets et ne ressemblant en rien à des appareils résultant de plus de 17 années de leçons tirées d’une position de pionnier en matière de vote électronique. Car croyez-le ou non, l’introduction des premiers ordinateurs à voter en Belgique remonte déjà à l’année pré-internet, à savoir 1994…

La Belgique avait résolument opté à l’époque pour le progrès technologique et se voulait visionnaire: nos appareils ont tenu le coup incroyablement longtemps (jusqu’en 2010) et n’ont pris une retraite bien méritée que l’année dernière. Au cours de cette période, grosso modo 40% de la population belge a pu voter électroniquement dans le cadre d’un projet considéré comme pilote par le gouvernement, du fait que la généralisation du vote électronique semblait susciter la crainte chez beaucoup.

Voilà qui est étrange en soi, car les administrations belges ont poursuivi entre-temps activement le développement de plates-formes gouvernementales sophistiquées permettant le traitement de la plupart des données sensibles: de tax-on-web jusqu’à la Banque-Carrefour Sécurité Sociale, elles sont toutes considérées comme des cas d’école eGov à l’étranger.

Cela n’a pas suffi à rassurer certains partis politiques qui ont rejeté tout ce qui était novateur dans le processus de vote, sous prétexte que cela serait soi-disant coûteux, opaque et sensible à la fraude. Selon eux, trop de gens ne pourraient pas utiliser les boutons ou – mieux encore – les écrans tactiles, sans compter l’un ou l’autre pirate qui pourrait ‘craquer’ le système: comme rien de tout cela ne s’est passé au cours de ces 17 années, il n’y a plus de raison d’en rester là.

La critique du prix de revient a toujours été boiteuse: je ne trouve pas surprenant que l’imprimeur puisse fournir du papier imprimé à moindre coût que le fournisseur d’ordinateurs à voter. Ce dont nombre d’esprits critiques vis-à-vis d’eVoting ne tiennent pas compte dans leurs comparaisons de prix de revient, c’est que le comptage de tout ce papier s’effectue à des salaires horaires pour lesquels même un ouvrier du bâtiment est-européen ne se dérangerait pas (3,5 € bruts de l’heure, et le dimanche en plus).

Les points de critique deux et trois sont quelque peu plus ardus: selon nos politiciens, le papier serait donc plus sûr et plus transparent que les systèmes électroniques. Indépendamment du fait que je ne comprends pas que le remplissage de la déclaration d’impôts puisse elle se faire dans un système sans papier, j’ai compulsé une étude qui doit étayer mes dires: pas moins de sept universités belges ont en effet été invitées à entériner scientifiquement ce raisonnement en réalisant une étude comparative avec des pays qui, comme susmentionné, accusent du retard sur nous.

Tout cela s’est traduit par un impressionnant rapport de 246 pages qui conclut que nous ne devrons plus colorier de petits ronds en Belgique, mais scanner des formulaires à codes-barres. Ce rapport indique du reste aussi que les experts sont d’accord sur le fait que le vote électronique est aussi sûr et fiable que le vote sur papier, mais comme cette observation est mentionnée en p. 128 plutôt qu’en p. 246, elle est scientifiquement moins pertinente.

Ce faisant, la Belgique a condamné par contumace son industrie innovante: au lieu d’orienter cette industrie (avec des leaders notoires comme Zetes) vers un système à voter électronique à part entière, le gouvernement a préféré faire comme si rien ne s’était passé sur le plan ICT au cours de ces vingt dernières années, et l’a poussée dans la direction des systèmes de caisse controversés, en ce compris le scannage de formulaires papier fraîchement imprimés. C’est comme si nous devions renoncer aux cartes de banque, sous prétexte que seul l’argent cash était encore fiable (qu’il faut alors compter électroniquement, çà oui). C’est regrettable, bien regrettable

Quoique, il n’est pas encore trop tard: exploitons la crise chez Smartmatic-Steria et engageons un manager de crise. Si les négociateurs se pressent et font appel à Jef Colruyt, nous aurons très rapidement un système qui ne nous coûtera pas cher, qui aura la confiance de toute la Belgique et qui témoignera en même temps d’une vision IT de l’avenir. Jef comme secrétaire d’Etat au vote électronique, pourquoi pas?

Koen De Vos Koen De Vos est Operations Manager de l’iLab.o à l’IBBT.

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