Frederik Tibau

Apple est le vrai gagnant dans l’accord avec IBM

Frederik Tibau est rédacteur chez Data News.

Apple et IBM vont collaborer de façon intensive sur le marché des entreprises. Même si les deux géants s’en porteront tous deux mieux, c’est surtout Apple qui tire les marrons du feu en l’occurrence.

Apple et IBM vont collaborer de façon intensive sur le marché des entreprises. Même si les deux géants s’en porteront tous deux mieux, c’est surtout Apple qui tire les marrons du feu en l’occurrence.

Aux débuts de l’ère du PC voici 30 ans, IBM et Apple s’affrontaient à couteaux tirés. Steve Jobs a même comparé un jour le marché du pc dominé par IBM à big brother, et il raillait le PC en le qualifiant de pâle décoction du Macintosh. Nous vivons toutefois dans un autre monde aujourd’hui. La lutte s’est déplacée du marché des PC vers le segment mobile. Et les deux ennemis d’autrefois se présentent désormais ensemble sur le marché des entreprises.

L’accord prévoit qu’Apple aura accès au réseau de distribution mondial d’IBM, et que les vendeurs d’IBM vont également proposer désormais des iPhones et des iPads à leurs clients (surtout des entreprises de plus grande taille et des administrations). Les gadgets d’Apple sont également prisés dans des secteurs comme les soins de santé et les banques, des segments qui n’ont jamais été prioritaires pour Apple.

De son côté, IBM se voit offrir la possibilité de diffuser son offre en logiciels via les populaires appareils iOS d’Apple, et de trouver davantage d’acheteurs pour ses outils de gestion pour les appareils mobiles. Les troupes de la CEO Ginni Rometty promettent déjà une centaine de nouvelles applications iPhone et iPad pour le marché professionnel, les services ‘big data’ de Big Blue devenant ainsi accessibles pour la première fois aux utilisateurs d’Apple.

Le mobile est l’un des grands points d’attention pour IBM, qui a connu des temps difficiles ces dernières années et a vu son chiffre d’affaires reculer pendant huit trimestres successifs. Que se passe-t-il?

IBM a du mal à s’adapter à l’ère du cloud computing, qui permet à des clients de petite mais aussi de grande taille de louer leur infrastructure de manière avantageuse dans le nuage. IBM vend dès lors de moins en moins de serveurs et de mainframes, et cela se répercute aussi sur l’activité des logiciels et des services (jusqu’à présent lucrative).

L’entreprise est ainsi entrée en quelque sorte dans un cercle vicieux. G. Rometty, qui est aux rênes d’IBM depuis 2012, a toute la peine du monde à rectifier le tir.

Entre-temps, G. Rometty a déjà vendu la division serveurs “low end” d’IBM à Lenovo, tout comme la division PC de Big Blue avait déjà été cédée précédemment à l’entreprise chinoise. Dans un certain sens, on pourrait donc dire que Big Blue, au lieu de serveurs et de mainframes mornes, va à présent utiliser des produits populaires, branchés et mobiles d’Apple pour relier son portefeuille logiciel et son offre de services. Tout devrait probablement se faire de manière plus fluide, et cela devrait influencer positivement le chiffre d’affaires.

Lorsqu’IBM, à l’instar d’une sorte de “version corporate” de Media Markt, vend 50.000 iPads à un client, il ne va pas seulement empocher une partie du bénéfice, mais il peut aussi négocier dans la foulée un contrat d’entretien et même y associer sa plate-forme de gestion pour appareils mobiles.

Quoi qu’il en soit, c’est surtout Apple qui fait une bonne opération. Si l’entreprise était déjà considérée comme un outsider sympathique dans le monde des entreprises, elle gagne énormément en crédibilité grâce à ce contrat.

Ce n’est pas négligeable, car même si de nombreux managers du Fortune 500 utilisent d’ores et déjà un iPhone, il reste encore énormément de potentiel pour Apple, surtout à présent que de plus en plus d’employés échangent leur BlackBerry pour un autre appareil. Avec le réseau commercial et les applis d’IBM en soutien, cela pourrait aller très vite pour Tim Cook et Cie. Et Apple pourrait redynamiser dans la foulée ses ventes d’iPad en perte de vitesse.

Ce qui nous amène aux perdants de l’histoire. Si Google veut s’implanter davantage avec Android dans le monde des entreprises, elle devra également se mettre en quête de partenaires. Egaler la portée d’IBM avec un seul deal s’apparente cependant à une mission quasiment impossible.

Microsoft a elle aussi dû avaler de travers hier. Alors que Satya Nadella met tout en oeuvre pour que les utilisateurs Windows traditionnels s’enthousiasment pour l’expérience Windows mobile, IBM et Apple lancent un fameux pavé dans la mare avec cet accord.

Enfin, des géants logiciels comme SAP et Oracle peuvent également se sentir visés. Ces entreprises essaient depuis longtemps de faire passer leurs applications logicielles spécifiques vers des appareils mobiles, et elles voient arriver un concurrent redoutable avec la combinaison IBM/Apple.

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