Une vision moins rose de l’outsourcing

Qu’est-ce qu’un projet d”outsourcing’ réussi? Les critères sont-ils strictement financiers? Quel est l’impact à plus long terme sur l’activité même d’une entreprise?

Dans le cadre de l’HIVA (Hoger Instituut voor de Arbeid), Monique Ramioul, chercheuse à la KUL, a examiné ces dernières années plusieurs cas d’externalisation. Sa conclusion est qu’un nombre important de délocalisations ont échoué, et qu’il n’est pas rare qu’une entreprise rapatrie ses activités en interne. “Nombre de projets sont mal préparés et les avantages en termes de coûts sont souvent largement surestimés car on ne tient pas compte des tâches de coordination et de ‘coaching’. La nécessité de décrire et de documenter les tâches est également souvent oubliée.” Selon elle, les cas d”outsourcing’ informatiques réussis, y compris vers l’Inde, s’expliquent par une grande implication du personnel ici même et à la bonne préparation d’un certain nombre d’intermédiaires.Monique Ramioul souligne que le plus grand défi de l’externalisation, et l’une des principales revendications du monde syndical, est de réussir à maintenir un contrôle sur le savoir-faire. “On ne sait parfois plus quelle casquette porte l’informaticien.” En matière d’IT, c’est la question épineuse de la documentation des développements et du transfert de connaissances, conditions essentielles pour garantir la pérennité des applications de l’entreprise, voire de l’entreprise elle-même.Depuis le bug “Le ‘bug’ de l’an 2000 a accéléré certains processus d’externalisation, mais jusqu’à il y a peu, l’externalisation était encore largement expérimentale et limitée à des fonctions métier de base. Les prestataires étaient encore pour l’essentiel des acteurs locaux,” explique Ramioul. Mais d’après elle, deux choses ont changé: on a assisté à une concentration de quelques prestataires mondiaux en ‘outsourcing’ (EDS, SBS, IBM, …) souvent plus grands que les entreprises qu’ils servent et qui sont donc en mesure de “faire” le marché. Deuxièmement, la notion de “coeur de métier” est de plus en plus floue et des pans de l’IT, encore considérés il y a peu comme sacrés, n’en font plus partie.ObjectiverFace à ces mutations complexes, une partie du monde syndical, en particulier à un niveau européen (via notamment la division IBITS de l’Union Network-UNI), essaie d’aborder le phénomène ‘outsourcing’ IT de façon spécifique, en affinant son discours. Mais ce n’est pas simple. “Il n’est pas facile de vendre l’idée aux syndicats qu’il ne faut pas systématiquement être sur la défensive”, constate Monique Ramioul. Elle participe, ainsi que divers syndicats européens (dont le syndicat chrétien flamand LBC) au [Moos Project], un projet financé par le Fond Social Européen, qui a précisément pour but d’objectiver l’externalisation IT, notamment par le biais de cas concrets. L’idée est de ne plus rejeter l”outsourcing’ en bloc, mais de travailler à un cadre juridique et social qui apporte un maximum de garanties au travailleur. Dégager en quelque sorte les “bonnes pratiques” sociales de l’externalisation. Moos Project va publier cet été un manuel qui a pour but de sensibiliser les représentants syndicaux aux spécificités de l”outsourcing’. L’enjeu pour les syndicats est également d’être davantage impliqués dans des processus d’externalisation “rampants” dont ils ont souvent l’impression d’être tenus à l’écart.Cet article est paru dans le cadre d’un dossier Outsourcing paru ce vendredi 26 mai dans Data News.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire