“On a besoin de gens qui ‘font’ et pas uniquement de managers”

Els Blaton dirige depuis quelques mois les quelque 600 collaborateurs du département informatique de la société de bancassurance Axa Belgique. On connaît très peu de directrices informatiques, a fortiori dans une entreprise de cette taille. Il était d’autant plus intéressant de l’entendre à propos de ses priorités et des enjeux d’une période charnière pour l’IT d’Axa, en pleine fusion avec son ex-concurrent Winterthur.

Depuis juillet 2006, Els Blaton (43 ans) dirige en tant que ‘deputy CIO’ les équipes informatiques de la filiale belge du géant de la bancassurance Axa. Elle a repris cette responsabilité de Philippe Wautelet qui, au sein du comité de direction, a été désigné pour assurer la coordination globale de la fusion avec Winterthur. Cette acquisition, annoncée en juin, a été finalisée en décembre 2006. Au niveau informatique, elle a bien évidemment chamboulé l’agenda, au point que la fusion des systèmes IT est devenue la priorité n° 1 et le plus gros chantier pour 2007. Comme pour toute fusion de cette ampleur, il a bien fallu faire des choix, parfois difficiles. C’est ainsi que le système dit “cible” sera celui d’Axa pour des raisons de simplicité et de vitesse d’exécution, Axa étant tout de même plus grande que Winterthur. Pourtant, selon une logique du meilleur de classe (‘best of breed’), certains applicatifs de Winterthur, par exemple le ‘front-end’ de courtage pour l’assurance vie particuliers, auraient pu apparaître comme plus appréciés par leurs utilisateurs et donc comme un meilleur choix.FusionEls Blaton nous explique que la phase d’analyse se termine et qu’elle commence à avoir une bonne vision des processus des deux entités. Il faut maintenant harmoniser les organisations. Une centaine d’informaticiens de Winterthur (situés avenue des Arts à Bruxelles) va rejoindre à terme les quelque 470 informaticiens (hors externes) d’Axa. Les équipes IT sont essentiellement installées au siège central du Boulevard du Souverain à Boitsfort, mais il y a également des équipes à Anvers. Chez Axa il y a aussi la possibilité de travailler quelques jours par semaine en “délocalisé” à Louvain, Gand ou Liège pour diminuer les déplacements pour les collaborateurs. Nous parlons ici uniquement des équipes IT composées pour l’essentiel de développeurs, analystes et de chefs de projet. Car le personnel en charge de l’infrastructure ICT a été versé il y a quelques années dans une société à part, baptisée Axa Technology, qui va d’ailleurs elle-aussi intégrer une quarantaine de collaborateurs de Winterthur. Cette entité, qui est une sorte de fournisseur interne, occupe pour l’instant un sous-sol du siège central mais va bientôt déménager vers Woluwe.Pour réussir l’intégration informatique des deux sociétés, Axa est occupée à se structurer en “usines”, avec par exemple une “usine migration de données” ou une “usine tests”. Une partie des tâches sera confiée à un prestataire externe pour ne pas entraîner une trop grosse surcharge de travail pour les équipes IT en place. Axa a lancé des appels d’offres à ce sujet. L’essentiel, selon Els Blaton, est que les exigences et les batteries de tests restent définies en interne.Refonte orientée “client”Outre la fusion, les autres priorités du département IT sont la continuation de plusieurs grands projets de réingénierie de l’activité bancaire et assurance d’Axa. Ces trois dernières années, Els Blaton avait déjà la charge de l’informatique d’Axa Bank (environ 170 personnes). De manière générale, sa mission a été et est toujours, à travers les systèmes d’information, de faire passer Axa d’une approche orientée “produits” à une approche orientée “client”. Ce besoin de transformation se manifeste particulièrement au niveau des applicatifs à l’attention des courtiers. A cet égard, un autre projet important qui va se poursuivre en 2007 est la refonte en Java (J2EE) de l’application IARD par laquelle les courtiers gèrent les dossiers d’assurance IARD des particuliers. Axa a pris la décision il y a quelque temps de standardiser tous ses développements internes en Java.La majorité des applicatifs d’Axa (utilisés par plus de 5.000 employés) sont faits maison. L’entreprise n’a par exemple pas acheté de progiciel ERP et n’utilise pour l’heure qu’un module ‘procurement’ de SAP, même s’il existe au niveau mondial un projet de migration vers SAP. Els Blaton laisse entendre qu’avant de se lancer dans une telle migration, il faut d’abord réussir l’intégration de Winterthur.Valoriser les profils techniquesL’obtention de la certification CMMI de niveau 2 (un standard qui mesure la maturité d’une organisation et de ses processus) fin 2005 est le résultat d’efforts continus pour élever le niveau de qualité de l’ensemble du département informatique. Cela passe également depuis plus de quatre ans par une nouvelle approche de formation, en collaboration avec les ressources humaines. Les spécialistes IT sont régulièrement détachés de leurs tâches quotidiennes (gestion de projet, maintenance) pour élargir leurs horizons et leur champ d’expertise technique. “C’est très important pour maintenir la motivation de l’informaticien”, souligne Els Blaton.A une époque où la plupart des observateurs prêchent que l’informaticien moderne doit être orienté métier et avoir des talents de chef de projet, Els Blaton pose un constat qui semble aller à contre-courant : “On ne valorise pas assez les profils techniques, en mettant par exemple en avant des profils ‘senior’ que ce soient des architectes, des analystes ou des programmeurs Cobol ou Java. La seule façon de faire carrière dans une entreprise n’est pas de devenir manager à un moment ou l’autre. Il faut reconnaître les experts. On a besoin de gens qui font.”

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