Nouveau système à voter: de grands points d’interrogation

Il semble très douteux que les élections communales de l’année prochaine se déroulent avec un nouveau système de vote électronique. Le groupe Smartmatic-Steria, qui avait décroché fin de l’année dernière l’appel d’offres en vue de fournir un prototype opérationnel d’un nouveau système de vote électronique, n’y est encore et toujours pas arrivé. En raison de ce retard, ces entreprises risquent dès à présent de se voir infliger une amende monstre. En outre, d’autres entreprises se manifestent.

Il semble très douteux que les élections communales de l’année prochaine se déroulent avec un nouveau système de vote électronique. Le groupe Smartmatic-Steria, qui avait décroché fin de l’année dernière l’appel d’offres en vue de fournir un prototype opérationnel d’un nouveau système de vote électronique, n’y est encore et toujours pas arrivé. En raison de ce retard, ces entreprises risquent dès à présent de se voir infliger une amende monstre. En outre, d’autres entreprises se manifestent.

Petit rappel: en décembre dernier, Data News apprenait que le groupe Smartmatic-Steria avait remporté l’adjudication – d’un montant de quelque 26,8 millions d’euros, d’après la publication officielle de l’attribution – afin de fournir le prototype d’un nouveau système de vote électronique. Les autres candidats, la néerlandaise Nedap et IBM Belgique, n’avaient pas été retenus.

Le prototype que la vénézuélienne Smartmatic et la française Steria développent, doit être basé sur les recommandations de l’étude effectuée par les grandes universités du pays: un système ‘hybride’ constitué d’un vote électronique contrôlable aussi sur papier.

Ces fournisseurs avaient du reste été choisis au niveau tant fédéral, flamand que bruxellois. En Wallonie, l’on avait choisi de lancer une procédure propre, pour ensuite décider qu’un nouveau système serait provisoirement trop coûteux et qu’on en reviendrait donc (temporairement) à la formule du crayon et du papier. Chaque canton pourrait cependant encore décider de recourir aux ordinateurs à voter. Néanmoins, en Wallonie, l’on était surtout tombé sous le charme du système du ‘voting pen’, que l’on voudrait tenter de conseiller aussi à la Flandre pour les élections régionales de 2014.

Or, même si le gagnant du contrat était déjà connu en décembre, la commande n’a été définitivement attribuée à Smartmatic-Steria qu’en février. En vertu du devis, le groupe disposait de 2 mois pour développer le prototype. Cela signifiait que le système de votre devait être prêt en avril 2011. Mais fin avril, Geert Bourgeois, ministre de l’intérieur flamand, déclarait en soupirant au parlement flamand que le prototype n’était toujours pas prêt, parce que Smartmatic avait pris du retard.

Powerpoints Nous voici à présent quasiment à la mi-septembre, soit plus de 8 mois après l’attribution officielle, et le prototype brille toujours par son absence, nous confirme-t-on au cabinet Bourgeois et à l’intérieur. A la région bruxelloise, l’on fronce les sourcils quand on évoque le système de vote électronique: “Un prototype? Nous n’avons provisoirement vu que des powerpoints.” Erwin Hertens, conseiller général auprès de la direction générale des institutions et de la population du SPF Intérieur, nous explique: “Le prototype se trouve en dernière phase de développement. Nous sommes en train de le tester et de l’évaluer en permanence. Il sera normalement prêt fin octobre.”

Le retard encouru fera aussi mal au groupe. Dans le devis, l’on trouve une clause de pénalité de 20.000 euros par jour de retard jusqu’à un maximum d’1 million d’euros. Chaque calcul effectué, sans tenir compte des week-ends et des jours de congé, révèle que Smartmatic & co. en sont aujourd’hui déjà à une amende maximale d’1 million d’euros.

“L’on m’a dit que le prototype sortira encore à temps pour permettre d’utiliser le système à voter l’an prochain”, nous explique Peter Buysrogge, porte-parole de Bourgeois. Théoriquement, il a raison: Smartmatic a elle-même déclaré disposer de 6 mois encore pour un déploiement complet. Une livraison fin octobre devrait encore le permettre. Le problème, c’est que la pratique et la théorie s’opposent souvent dans ce genre de grands projets IT. Car il faut non seulement évaluer le système, mais il doit aussi satisfaire à une expérimentation de vote réelle (qui doit donc encore avoir lieu). Ensuite, le système doit être certifié par un organisme de contrôle agréé, dans ce cas PriceWaterhouseCoopers. L’attribution définitive d’un déploiement complet doit encore intervenir. Pour tout cela, les autorités ont fixé la date butoir ultime à la mi-décembre.

Et en cas d’échec?

Le timing semble donc très juste, bien que la question de savoir ‘et en cas d’échec?’ soit rejetée par Erwin Hertens: “Nous partons de l’idée que cela va réussir, sinon nous aurions arrêté les frais depuis longtemps déjà. Cette question n’est donc pas à l’ordre du jour. Nous n’anticipons pas sur l’évaluation. Sur base du résultat que l’évaluation donnera, l’on se concertera pour savoir quelles mesures prendre.” En avril, Bourgeois avait esquissé deux options possibles: soit un retour aux anciens ordinateurs à voter en combinaison avec le vote papier, soit le vote au moyen du crayon et du papier, comme ce sera le cas en Wallonie.

Y aurait-il quand même une troisième option? Alors que nous préparions cet article, nous avons reçu une invitation d’IBM Belgique, Zetes et Arco pour la présentation d’un… nouveau système à voter. D’après les rumeurs, il s’agirait d’un système complètement développé en Belgique avec un ‘voting pen’, le concept même qui a soulevé l’enthousiasme en Wallonie. La question à se poser est cependant la suivante: pourquoi présenter encore un nouveau système à voter, alors que la principale adjudication dans ce domaine sera accordée à Smartmatic-Steria? Ou IBM et consorts anticiperaient-elles un échec?

Tant Smartmatic que Steria n’ont provisoirement pas réagi à nos questions.

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