Et si on faisait le point sur les wearables?

© Huawei
Michel van der Ven
Michel van der Ven Rédacteur chez Data News.

Nombre d’observateurs de tendances prévoyaient, il y a quatre ans encore, que nous porterions toutes et tous aujourd’hui une montre intelligente. Le fait est que l’Apple Watch est la montre la plus populaire au monde et se vend même mieux que celles de grandes marques helvétiques telles Swatch et Rolex. Mais l’innovation ne semble entre-temps plus être au rendez-vous. Pourquoi le wearable n’est-il encore et toujours pas le Communicator de Star Trek? Et pourquoi monsieur Tout-le-monde n’est-il pas vraiment friand de ce genre de produit?

Et si on faisait le point sur les wearables?
© Apple

Cette croissance est en grande partie due à l’introduction de l’Apple Watch Series 4 (à partir de 429 euros), qui est en vente depuis la mi-septembre, caractérisée notamment par un plus grand écran, la détection de chutes et une fonction ECG pour effectuer des vidéos du coeur (électrocardiogrammes). Ce dernier gadget ne fonctionne provisoirement du reste qu’aux Etats-Unis.

Tout comme nos voisins du nord appellent par facilité chaque verre d’eau pétillante du Spa, le grand public qualifie d’Apple Watch toute montre intelligente. Certes, certains s’en tiennent encore à l’iWatch, alors qu’Apple n’a elle-même jamais utilisé ce nom de produit. On peut tirer deux conclusions de ce qui précède: 1) au bout de toutes ces années, le grand public ne connaît pas encore grand-chose des montres intelligentes et autres wearables, et 2) la seule marque qui enregistre un certain succès sur ce marché de niche, c’est Apple.

La marque à la pomme ne cite aucun chiffre concret pour ce qui est de ses montres connectées, mais selon son directeur, Tim Cook, les ventes de l’Apple Watch ont progressé de plus de 50 pour cent au cours du quatrième trimestre fiscal de 2018. L’analyste de marché IDC a déterminé qu’il était question de quelque 4,2 millions d’unités vendues, soit 1,5 million d’exemplaires en plus qu’au cours du trimestre correspondant de l’année précédente.

En comparaison avec les quasiment 47 millions d’iPhone vendus, durant le même trimestre, les 4,2 millions de montres intelligentes ne font peut-être pas le poids, mais on ne peut pas non plus qualifier l’Apple Watch de flop. La preuve, c’est qu’au cours du dernier trimestre de 2017, Apple a, selon les analystes, vendu plus de montres (intelligentes) que toute l’industrie des montres helvétiques. Or, il s’agit là d’une branche industrielle possédant des centaines d’années d’expérience au compteur, alors qu’Apple n’est apparue sur ce marché qu’en 2014.

Qui est (et devient) le plus grand?

Ce n’est pas Apple, mais la firme chinoise Xiaomi quelque peu moins connue chez nous qui est actuellement le plus grand fabricant de wearables. Xiaomi a dépassé la marque à la pomme durant le troisième trimestre de 2018, notamment grâce à ses excellents chiffres de vente du Mi Band 3, un traceur fitness à prix avantageux (il ne s’agit donc pas d’une véritable montre intelligente). Le watchOS d’Apple est cependant la principale plate-forme et le reste provisoirement. L’analyste de marché IDC s’est risqué à une prévision pour 2022 et prévoit à ce moment une part de marché de quasiment 36 pour cent pour l’écosystème d’Apple. La deuxième place (22 pour cent) serait occupée par Android, à ne pas confondre avec Wear OS. Android pour wearables est un système d’exploitation entièrement gratuit de Google, qui est surtout populaire auprès des fabricants chinois. Selon IDC, la plate-forme Wear OS assez importante de Google se classera à la troisième place en 2022 avec une part de marché de 20 pour cent, suivie par des acteurs plus modestes comme Samsung (Tizen) et Fitbit (Fitbit OS).

iPhone ou téléphone Android?

Un inconvénient de l’Apple Watch (même si le fabricant de Cupertino préférerait parler d’une ‘caractéristique’), c’est que la montre n’est compatible qu’avec les iPhone. Sans ce type de smartphone, elle ne vous sert donc pas à grand-chose, à moins que vous ne choisissiez le modèle cellulaire plus indépendant avec eSIM embarqué. Cette version plus coûteuse, reconnaissable à l’anneau sur la couronne numérique, n’est du reste pas encore disponible en Belgique.

Si vous utilisez Android, mieux vaut vous tourner vers une autre montre intelligente, qui collabore parfaitement avec votre smartphone. Il peut s’agir d’un modèle tournant sur Wear OS, le système d’exploitation de Google, comme l’Huawei Watch 2 (à partir de 199 euros). Mais il en existe d’autres. C’est ainsi que la nouvelle Galaxy Watch de Samsung (à partir de 309 euros) tourne sur Tizen 4.0, un système d’exploitation open source basé sur Linux, qui a été peaufiné entre autres par Samsung même et Intel. On le retrouve également dans certains téléviseurs intelligents du géant technologique sud-coréen. Quant au fabricant de wearables Fitbit, il a lancé en décembre une version 3.0 de son Fitbit OS, destiné aux modèles Ionic et Versa (à partir de 199 euros). Toutes ces montres fonctionnent par ailleurs aussi sans problème avec un iPhone: l’Apple Watch est ainsi la seule montre non connectable multi-plates-formes.

Un grand nom qui brille par son absence, c’est LG. Cet autre géant sud-coréen dispose certes de montres intelligentes dans sa gamme, dont la toute récente W7 aux ‘aiguilles physiques’, mais elles ne sont provisoirement plus vendues en Belgique, probablement parce que la concurrence y est trop forte. Ce qui ne signifie pas que les ingénieurs de LG se tournent les bras. D’un brevet récemment transmis, il ressort en effet que l’entreprise prépare une nouvelle montre intelligente, dont le bracelet intègrera un appareil photo, afin de pouvoir effectuer des prises de vue sans smartphone. Affaire à suivre assurément.

Le côté intelligent d’une smartwatch réside surtout dans la détection automatique d’activités. Cela évite aux utilisateurs sportifs pas mal d’ergotage à l’écran et tout un tas d’entraînements loupés.

Pour chaque plate-forme citée, il existe un magasin d’applis individuel. La plus vaste gamme d’applications pour montres intelligentes se trouve dans l’App Store d’Apple et dans le Google Play Store. Tizen est en train de rattraper son retard lentement, mais sûrement, alors que chez Fitbit, le choix est encore assez limité. L’expérience nous a du reste appris que le nombre d’applis disponibles n’est pas si important. Ce qu’il est bien plus, c’est que vous puissiez installer ces applis essentielles pour vous. Cela dépend entre autres des appareils que vous possédez et des services que vous utilisez. C’est ainsi qu’avec une montre Fitbit Versa, il est parfaitement possible de télécharger de la musique via Deezer ou de commander chez vous votre thermostat Nest ou l’éclairage Philips Hue. Si vous disposez par contre d’un abonnement chez Spotify et d’un thermostat intelligent d’une autre marque, vous resterez provisoirement sur votre faim avec cette montre. Parmi les plates-formes plus modestes, certaines applis sont aussi payantes, alors qu’elles sont généralement gratuites chez Apple et Google. Cela est souvent dû au fait qu’elles ne sont pas développées par le fabricant lui-même, mais par des utilisateurs enthousiastes, qui y voient ainsi une manière de gagner de l’argent.

Milliers de cadrans

Pour le fervent amateur de montres, les cadrans sont évidemment très importants. Ils sont échangeables sur chaque montre intelligente, mais cela va de pair avec des complications allant souvent jusqu’à des détails. Les difficultés concernent tous ces petits extras sur le cadran, qui n’ont rien à voir avec l’indication de l’heure même, comme un chronomètre ou la position du soleil. Bon à savoir: l’Apple Watch possède deux douzaines de cadrans différents, dont certains très élégants, mais la montre ne supporte temporairement aucun cadran d’autres développeurs. L’offre fait donc pâle figure à côté des milliers de designs que vous pouvez télécharger – gratuitement ou à moindre coût – pour Wear OS et Tizen. Si vous recherchez surtout un modèle de montre intelligente quelque peu plus unique, plongez-vous alors dans les catalogues de marques comme Fossil, Skagen, Armani ou Michael Kors, comprenant aussi de très nombreux modèles pour dames. La plupart de ces montres sont pilotées par Wear OS de Google.

Nous avons initié cet article en mentionnant que la toute nouvelle génération de montres intelligentes n’était guère innovante. La principale amélioration en est l’autonomie: alors que les premiers modèles avaient du mal à atteindre la fin de la journée, l’accu de la Samsung Galaxy Watch par exemple tient parfaitement le coup trois, voire quatre jours complets, ce qui commence à compter. Les montres intelligentes sont aussi toujours plus souvent étanches et équipées d’une fonction GPS. Depuis, les clients de certaines banques en Belgique peuvent aussi payer sans contact avec leur gadget et ce, via Apple Pay et Google Pay. Les alternatives de la concurrence, Samsung Pay et Fitbit Pay, ne sont pas encore disponibles dans notre pays.

Sportif et en bonne santé

Au bout de toutes ces années, la montre intelligente n’en reste pas moins avant tout un transmetteur des messages et notifications de votre téléphone mobile. Ou une télécommande (supplémentaire) pour votre service de diffusion musicale pour les nombreux autres gadgets de votre habitation, allant de l’aspirateur-robot à la caméra de surveillance connectée. Tout cela est certes très pratique, mais ce ne sont pas là des ‘applis révolutionnaires’, puisqu’elles se trouvent en effet déjà sur votre smartphone. Les deux seules exceptions sont les applis de santé et de fitness. Quiconque est un brin sportif (ou un fan de sports) dispose avec une montre intelligente moderne d’un véritable entraîneur personnel. Ce qui est très intéressant avec la plus récente génération de montres intelligentes, c’est qu’elles sont capables de reconnaître d’elle-mêmes des activités. Si vous faites du vélo ou si vous allez courir, la session sera automatiquement identifiée et enregistrée. Cela vous évitera non seulement pas mal d’ergotage sur le mini-écran, mais vous n’oublierez plus non plus le début et la fin d’un entraînement, ce qui peut s’avérer assez frustrant. Pour le grand public, il existe aussi des applis qui invitent à bouger davantage ou d’effectuer des exercices respiratoires pour aider à décompresser.

Quiconque ne porte pas une montre analogique dans la vie de tous les jours, n’appartient absolument pas au groupe-cible de la montre intelligente.

Ces applis sportives représentent donc un petit pas vers la santé. La Fitbit Versa fait ici preuve d’originalité avec sa fonction Female Health Tracking, destinée à donner aux femmes une meilleure vision de leurs périodes de fécondité et de la relation entre leur cycle de menstruation et leur état de santé général. En saisissant des symptômes tels la migraine et les crampes, la Versa réalise par exemple des prévisions de cycles de plus en plus précis. Un simple coup d’oeil sur la montre, et celle qui la porte sait aussitôt dans quelle phase elle se trouve. Peu avant la prochaine ovulation, une notification peut même être envoyée.

Au cours des années à venir, Apple misera elle aussi nettement sur la santé avec ce qui, selon son CEO Tim Cook, pourrait devenir ‘la principale contribution d’Apple à la race humaine’. Et de renvoyer ainsi notamment aux ResearchKit et CareKit de l’entreprise, des plates-formes qui génèrent un nombre infiniment grand de données médicales, entre autres par le truchement des capteurs de l’Apple Watch. En faisant participer (bénévolement) les utilisateurs, via leurs gadgets, à des études médicales, Apple espère que des maladies pourront à l’avenir être approfondies de manière plus aisée. Une étape importante accomplie dans ce cadre concerne la fonction susmentionnée ECG de l’Apple Watch Series 4, permettant de détecter des problèmes cardiaques à un stade précoce.

En résumé

Voilà qui nous amène à cette autre question: pourquoi monsieur Tout-le-Monde n’utilise-t-il encore et toujours pas ce genre de montre intelligente? La réponse est très simple en fait: quiconque ne porte pas une montre analogique dans la vie de tous les jours, n’appartient absolument pas au groupe-cible de la montre intelligente. Il s’agit en effet avant tout d’une montre qui donne l’heure et la date. La valeur ajoutée de la montre intelligente – principalement une espèce de relais du smartphone – est jusqu’à nouvel ordre tellement réduite qu’elle ne fait pas changer les consommateurs d’avis. Les exceptions sont les personnes qui font souvent du sport ou qui veillent de près à leur état de santé. Mais même si l’on se base sur leur enthousiasme, la montre intelligente risque de rester probablement toujours un produit de niche, tout comme ce fut du reste aussi le cas de la montre classique.

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