De la téléréalité, via l’ego-internet, jusqu’à l’impact en temps réel?

Stefan Grommen Stefan Grommen est rédacteur de Data News.

Les premières séries de TV réalité avaient un côté intéressant. On les qualifiait même d’expérience sociale. Elles donnèrent aussitôt une nouvelle impulsion au paysage télévisé. Je trouvais et trouve encore que certains concepts apportent quelque chose, surtout quand on est en quête de talent dans la musique, la restauration ou autre. Malheureusement, cela a vite débouché sur un fouillis sur-commercialisé, où une certaine naïveté (feinte ou non) peut être achetée en échange de… 15 minutes de gloriole.

Les premières séries de TV réalité avaient un côté intéressant. On les qualifiait même d’expérience sociale. Elles donnèrent aussitôt une nouvelle impulsion au paysage télévisé. Je trouvais et trouve encore que certains concepts apportent quelque chose, surtout quand on est en quête de talent dans la musique, la restauration ou autre. Malheureusement, cela a vite débouché sur un fouillis sur-commercialisé, où une certaine naïveté (feinte ou non) peut être achetée en échange de… 15 minutes de gloriole.

En marge du congrès ‘L’avenir des médias’ à Hollywood, nous avons débattu avec plusieurs personnes de la TV, des journaux et d’internet, surtout de la deuxième génération des plates-formes internet. Le web 2.0 a comme grand principe de mettre l’utilisateur entièrement au centre et de remplacer le monologue par un dialogue constant. MySpace, Facebook, voire Netlog chez nous se distinguèrent vite. Ces plates-formes de socialisation offrent énormément de possibilités, et les portails traditionnels comme Yahoo, MSN ou Skynet ont de plus en plus de mal à attirer et garder leurs visiteurs. Ce sont surtout les jeunes qui ‘vivent’ sur ces réseaux sociaux où ils s’échangent photos, nouvelles, opinions,… Je crois fermement dans le potentiel des réseaux sociaux et peut-être encore plus dans la communication venant de l’homme, ce qu’on appelle le marketing conversationnel.

La toute nouvelle révélation s’appelle Twitter, une plate-forme qui permet de partager en 140 caractères des idées, infos, etc. avec d’autres. Elle est déjà qualifiée d’ultime plate-forme de communication ouverte, une sorte de mailbox publique ou SMS-box, où tout un chacun peut lire vos messages. Ce ne sont pas vraiment les plus jeunes, mais surtout les 25-45 ans qui utilisent Twitter, ce qui fait que cette méthode commence à avoir un puissant impact sur la manière de communiquer, partager et rechercher.

Au congrès d’Hollywood, les TV-executives argumentèrent que ces médias sociaux sont en train de déboucher sur du reality-show sans précédent. Les internet-boys avaient des années durant “craché’ sur la TV-réalité, mais ils se sont finalement révélés encore nettement pires. Alors que la TV-réalité se caractérisait encore par un format et une production de qualité, les Facebook et Twitter sont eux devenus une exposition publique, faisant la part belle à la recherche publicitaire et au partage. Les 15 minutes de gloriole à la TV y sont remplacées par 15 fans, 15 clics ou 15 followers, comme on les appelle dans Twitter. Le fait est que nombre de messages sont sans valeur pour la majorité. Dans Twitter ou Facebook, la faillite de GM, une catastrophe ou un message du style ‘je suis à la toilette’ sont en effet tout aussi importants, ce qui fait que beaucoup d’annonceurs se sont mis à douter de la cible des réseaux sociaux.

Car il y a peut-être besoin de bien plus, à savoir de plus de créativité, d’efficience et de réflexion pour faire évoluer le web vers un moyen de communication efficace, afin de créer d’autres histoires à succès que celle de Google. Reste à espérer que l’industrie internet gère mieux cette vague d’innovations que la précédente, dont la constante négation et les promesses abusives avaient débouché sur une énorme bulle. Même si elle était nettement moins scandaleuse que la bulle des banques et de leurs parachutes dorés, la bulle internet des années 2000 est déjà tout à fait oubliée. Les médias sociaux peuvent entraîner l’une des plus importantes évolutions publicitaires de l’histoire, mais d’autre part aussi déboucher sur l’exhibitionnisme gratuit, sur un support de l’ego surdimensionné avec ses stars et ses perdants.

Mais ne me comprenez pas mal: l’impact et les possibilités des médias sociaux, dont Twitter, sont énormes. Mais Twitter est intéressant aussi pour une autre raison. La croissance de cette jeune entreprise, qui débuta sous forme de projet auxiliaire d’une entreprise de podcasting, est déjà incroyable avec ses 30 millions d’utilisateurs actuels. Mais Twitter est devenu synonyme d’une tendance fondamentale dans l’utilisation de l’internet, à savoir le glissement vers le temps réel, l’instantanéité de l’internet. Cet impact est plus fondamental qu’il n’y paraît, et même les entreprises internet les plus réputées adaptent leur stratégie à l’évolution de Twitter. Facebook (quelque 300 millions d’utilisateurs aujourd’hui) a déjà adapté sa page d’accueil aux photos, amis, applications et événements en diffusion real-live de ‘what’s on your mind’. Google, de loin l’entreprise internet la plus fructueuse avec plus de 20.000 personnes et un chiffre d’affaires estimé à 15 milliards $ pour 2009, doit subitement aussi relever un défi. Sa mission consistant à organiser l’information du monde et à la mettre à la disposition de tout un chacun devra suivre le rythme imposé. Même Sergei Brin, son co-fondateur, vient de déclarer que l’adaptation à la recherche en temps réel sera l’une des principales évolutions que Google devra relever. En quelques mois, Twitter, avec quelques dizaines de collaborateurs seulement, a eu plus d’impact et fait plus de bruit que n’importe quelle startup de la Silicon Valley. Et cela en fait déjà une proie prisée pour Yahoo, Microsoft, Google, Facebook, voire Apple.

Mais plus que jamais, c’est aussi l’histoire de la manière dont l’internet, plus que toute industrie, donne l’opportunité de créer, au départ d’une idée, une entreprise capable justement de renverser les industries en place, de convaincre les utilisateurs et d’inspirer beaucoup d’autres. Le côté spécifique d’internet, c’est qu’il permet à quelques-uns de provoquer un impact global sans grands investissements. Et plus que la question de savoir si Twitter sera ou non un succès, il y a le fait que la Californie réussit toujours à mettre en oeuvre, développer et dominer ce genre d’écosystème. Alors même qu’un pays comparable en grandeur comme la Belgique n’y parvient pas. A quand le changement chez nous?

Bart BecksBart Becks est ex-CEO de Belgacom Skynet, ex-membre de la direction du géant des médias SBS/ProSiebenSat1 et a été brièvement actif comme président international chez Netlog. Il est aussi co-fondateur de Glechar Music Ventures.

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